vendredi 27 octobre 2017

Généathème : Anne ma chère épine

100 mots pour une vie, 100 mots pour une épine
 
Collection personnelle
 
Née vers 1756, ma chère Anne épouse, avant 1797, Denis Gay-Rosset un cultivateur,
où mystère ? Sa vie de mère se déroule à Montgilbert, petit village, en Savoie.
 
Elle a au moins quatre enfants : Antoine, Blaise, Thomas
et François-Joseph mon ancêtre.
 
Selon les actes de baptêmes ou de décès de ceux-ci, son patronyme est orthographié
Poti Potti Potty Pothi Potheau.
 
Elle devient veuve en 1813, je l’imagine mère autoritaire, allez savoir pourquoi ?
Elle quitte notre terre en 1835, dite octogénaire, fille de Jacques Poti
et d’une mère au nom inconnu.
 
Ainsi vont les écrits et les registres manquants.
 
 
 

Denis GAY-ROSSET (SOSA 88) 1766-1813 Montgilbert
Anne POTI (SOSA 89) ca 1756 ? -1835 Montgilbert
 
- Antoine GAY-ROSSET marié à Antoinette BUET
- Blaise GAY-ROSSET
- Thomas GAY-Rosset
- François Joseph ROSSET (SOSA 44) marié à Martine BUET
  puis à Anne RIVET (SOSA 45)
 
 
Sources
Archives départementales Savoie 
 

samedi 21 octobre 2017

Le farfadet des Hurtières

Milieu du mois d’octobre 1869 en Savoie, je profite du rendez-vous mensuel avec mes ancêtres pour rallier Saint Georges d’Hurtières et prendre le chemin du hameau de Froide-Fontaine pour la première veillée automnale.

Je suis attendue chez François GERVASON  (SOSA 20) et son épouse Jeannette LANDAZ (SOSA 21) cultivateurs, mes arrière-arrière-grands-parents ! Je croyais avoir grimpé  rapidement, cela ne doit pas être le cas. Deux silhouettes me précédant, dont l’une avec une lanterne, m’ont aidée à trouver la maison. Je m’engouffre, collée à leurs basques.

De nombreuses personnes sont déjà rassemblées.  Parmi les adultes, il y a peut- être Claudine Landaz la sœur de Jeannette qui habite le village ? Parmi la troupe enfantine, lesquels sont les petits du couple ? Bon, je joue au fantôme, ou je me présente ?

Jeannette LANDAZ s’avance avec dans les bras une gamine de 2-3 ans :
« assieds-toi là ! La petiote c’est Marie-Philomène, tiens voilà aussi Liduvine-Franceline (4 ans) et la grande Marie-Angélique (8 ans). Le bébé Jean-Marie est dans le berceau, à côté de la grand-mère Josèphte FORAY. »

«  bah, je sais que celui qui t’intéresses, il est avec les hommes : Moïse Séraphin (10 ans) bien grand et costaud déjà. Le père François mon homme, non plus, il a pas compris qui tu étais, mais comme çà t’es pas seule ! » Ledit François s’étant rapproché, opine du bonnet.

Et me voilà installée au bout d’un banc, avec la petiote sur les genoux, mon hôtesse ayant fort à faire. Un pas en avant, un pas en arrière, François GERVASON ouvre la bouche pour m’asséner :

« Comme t’es une étrangère tu sais pas que le pays des Hurtières est plus riche dans la profondeur de la terre que sur le sol, y a des trous, des mines quoi ! On est pas que des gratteurs d’un sol pauvre ! »

Soudain un homme ajoute : «les mines de cuivre et de fer depuis la nuit des temps, on les creuse, du bon minerai, tiens l’autre jour l’instituteur y a dit qu’on a fait ici la belle épée du nom de Durandal pour un Roland de Roncevaux ! »

François mon aïeul, désigne un autre homme  et d’une voix forte : « bon ben, pour tout le monde, raconte comment on fait au début d’une mine, et bien : la dame, elle connaît pas, et puis les gamins ils aiment bien réentendre »
 
Gallica

Le conteur réquisitionné, enlève son chapeau, se gratte le crâne, comme pour se mettre en condition, me lorgne et se lance :

« Côté paperasses, bien sûr le notaire sur un beau papier timbré, il note tout : l’endroit de la mine, le nom de celui qui va creuser la mine et d’autres choses. Mais le plus important, le notaire, l’autre personne, et les témoins, ils vont tous à l’entrée de la mine.

Le nouveau possesseur - qu’on dit-  il se mouille l’index, et trace une croix sur le roc, puis se signe, pose la main droite sur  la croix, et après la lecture de l’acte dit: « je le jure, amen ».

« Tout ça c’est important pour éloigner  les dangers dont les mineurs sont souvent victimes dans leurs travaux, cette cérémonie c’est pour se protéger des esprits qui habitent les profondeurs des galeries. »

Petite pause, le conteur ajoute :
«  parmi ces esprits, le plus méchant par ses malices et ses espiègleries est le farfadet, aux longues ailes de chauve-souris. Caché dans les coins les plus sombres, il se livre à toutes sortes de gentillesses d'un goût douteux. Il  en sort à l’improviste, tord l’épinglette dans le trou de la mine, mouille la mèche, et pour cela, procède d’une façon fort inconvenante. »

« C’est quoi l’épinglette ? » questionne Moïse Séraphin, très attentif.

« Une tige de fer utilisée pour percer la cartouche introduite dans un trou de mine avant d'y mettre la mèche.  Et ce filou et cruel farfadet va quelquefois jusqu’à allumer le grisou.
Gare à l’explosion ! Il en est souvent la première victime, il s’y brûle les ailes, mais cela ne le corrige point, et le lendemain, il reprend le cours de ses gamineries ordinaires. »

« Oh là là c’est grave ! » murmurent de jeunes voix.
François GERVASON conclut : «  comme les enfants, le farfadet invente des tas de bêtises, et certaines sont très dangereuses pour ceux qui travaillent dans les galeries ».

Et le conteur après un regard circulaire sur l’assemblée souligne :
« Il y a une autre cérémonie importante contre les mauvais esprits pour le nouveau propriétaire d’une mine des Hurtières. Pour se débarrasser des importunités du farfadet, il doit déposer chaque soir à l’entrée de la mine, un petit panier de provisions. Le lendemain matin, bien sûr il n’y a plus rien dans le panier. »

Ou comment se concilier le farfadet de la mine … et conjurer le sort ...

Peut-être y-a-t-il dans le panier des châtaignes grillées, comme celles que viennent de préparer Jeannette et sa belle-mère Josèphte.
 

Gallica
Qui suis-je pour prétendre ébaucher la vie de mes ancêtres dans une commune où la culture et l’élevage était le parent pauvre, et  les entrailles de la terre faisaient des paysans également des mineurs de montagne. Le tout était d’avoir de bons muscles : gratter le sol l’été, creuser la terre l’hiver, taper dans les filons, double activité nécessaire pour vivre, voire survivre.

C'était peut-être le cas pour François GERVASON, qui n’était pas né dans la commune, et qui se déclarait cultivateur.  Paysan-mineur, c’était sûrement le cas de ses voisins, et apparaît là toute l’importance de la légende du farfadet.



Sources :
Famille : Archives Départementales Savoie
Légende : Gallica  Antony Dessaix Légendes et traditions populaires de la Savoie 1875
 
Pour aller plus loin sur la mine de Saint Georges d’Hurtières :

vendredi 13 octobre 2017

Annette Philomène une savoyarde

Mémé Annette, plus que Mémé Philomène, avec pour patronyme GERVASON, était ma grand-mère paternelle. L'univers étrange de la généalogie m'incite à t'évoquer et à esquisser un fil de ta vie.

Tu vois le jour à Randens, petite commune de Savoie, le 17 juillet 1891. Annette Philomène tels sont les deux  prénoms déclarés à l'officier d'état-civil le lendemain de ta naissance, par ton père Moïse Séraphin GERVASON cultivateur, sans doute fier du troisième enfant que Marie Louise ROSSET son épouse vient de mettre au monde.

Lors de ton baptême le prêtre te baptise Anne comme Sainte Anne mère de la Vierge, car Annette il ne connaît pas ! Sainte Philomène doit être dans ses tablettes … De façon classique, tu portes le second prénom de ta marraine Marie Philomène Gervason une tante paternelle, et tu as pour parrain  François Auguste Rosset un oncle maternel.

Vers 1896, ta famille s’installe juste en face à Aiguebelle, gros bourg doté d’une gare. Tu as grandi au sein d’une fratrie de 8 enfants, où vraisemblablement chacun devait s’entraider.

Tu n'es pas allée chercher bien loin ton promis qui habitait juste à côté : Louis Célestin PORTAZ employé des chemins de fer, comme son père  Louis Xavier, originaires de Modane.

Pour suivre ton époux, tu habitas d'autres lieux en Savoie et plus tard t’installas en Haute Savoie.  Trois fils arrivèrent assez vite, puis un autre fils et ensuite une fille.

Je l'aime bien cette photo datée a priori de 1922, où tu poses fièrement avec ton époux et vos trois premiers garçons. Vêtue d'un chemisier blanc, très fin sautoir et petites boucles d’oreilles, les joues bien rondes, les yeux sombres, tes cheveux coiffés en chignon de façon asymétrique ce jour-là me semble-t-il.

Vous étiez tous habillés « sur votre trente et un » pour poser chez le photographe !
 
Collection personnelle

Petite, sur toutes les photos, j'ai comme l'impression que tu ne veux pas perdre un seul centimètre.

Une vie qui s'est déroulée entre le monde de l'agriculture et le monde des chemins de fer, certainement pas facile, avec 4 puis 5 hommes à la maison.

Si ton époux  ne partit pas au front lors de la première guerre mondiale en 1914, c’est en raison de son métier au titre des Sections de Chemin de Fer de Campagne. Mais dès les premières semaines du conflit ta famille fut endeuillée par le décès de ton beau-frère, puis ceux de deux cousins germains.

Plus tard, tu eus la douleur de perdre ton troisième fils décédé accidentellement en 1955, et l’année suivante ton époux.

Mais entre-temps des petits-enfants avaient agrandi le cercle familial. L'été, tu les avais parfois dans ton logis. En ce qui me concerne, c'était des visites à la journée avec mes parents, ou seulement avec Papa parfois.

Je garde le souvenir de ta petite maison, d'un jardin potager bien entretenu où j'ai appris à ne pas confondre le persil  et les fanes de carottes,  jardin avec une bordure de fleurs et un puits. Vague réminiscence d'un chien qui lui ne me terrifiait pas !
 
Je garde en mémoire l'image d'une grand-mère avec un petit chignon sur la nuque, toujours vêtue de sombre, et souvent avec un tablier.

En tout cas pour le mariage de ton fils aîné et de mon baptême tu t'étais déplacée avec ton époux, et tu arborais un chapeau. Celui de mon baptême est de paille noire (portant le deuil de tes parents sûrement). Ce chapeau classique est acceptable contrairement au curieux couvre-chef de mon autre grand-mère.

Pour ma naissance, tu avais trouvé le temps de me tricoter une robe de laine. Ce cadeau figure dans mon livre de première enfance annoté par Maman.

Annette Philomène petite esquisse tout simplement, car de tes goûts et aspirations, douleurs ou inquiétudes je ne sais rien, esquisse-témoignage. Vie d'une grand-mère de 1891 et 1967.
 
Avec toi Mémé Annette Philomène et ton patronyme dont je n'appréciais pas la sonorité je suis remontée loin dans le temps bien étonnée de mes trouvailles.